S'abonner
Distribution

Speedy : Manuel Diogo, fidèle à ses convictions

Publié le 8 août 2025

Par Romain Baly
5 min de lecture
De son enfance au Portugal à son arrivée en France, Manuel Diogo en a très tôt tiré la conviction que, dans la vie, il valait mieux avancer à son compte et avec le soutien d’une équipe soudée plutôt que de rester inféodé à un patron. Depuis 35 ans, que ce soit dans l’univers du carburant ou de la réparation rapide, le dirigeant est resté fidèle à cette ligne directrice. Toujours maître de son destin, mais jamais seul pour le mener.
Après avoir longtemps fait carrière dans la distribution de carburant, Manuel Diogo a découvert le monde de la réparation en 2014 avec un premier Speedy à Neuilly sur-Seine, puis un second au Chesnay. ©JDP

Discret mais charismatique, calme mais affable, simple mais pertinent… Manuel Diogo est un chef d’entreprise qui dénote. Un patron qu’on confondrait presque avec ses salariés, et cela lui va très bien. Mais qui a pourtant pleinement, et depuis longtemps, endossé un costume largement à sa mesure. Discuter avec lui autour d’un café est un moment précieux, parce qu’aussi facile qu’instructif, et qui renvoie à une certaine image du commerçant de proximité.

Soucieux des siens et des autres, Manuel Diogo mène sa barque à sa façon depuis maintenant 35 ans. Dans une transparence confondante, il admet que faire carrière dans l’automobile n’était ni un objectif ni une passion. Son ambition était ailleurs. De son enfance dans le sud du Portugal, il a gardé la conviction qu’il valait mieux être indépendant, avec le lot d’avantages et d’inconvénients que cela implique, plutôt que de rester à la botte d’un patron.

"Je ne vois pas mon métier comme une passion, explique-t-il, presque en s’excusant. Quand je suis arrivé en France, mon objectif était de mieux gagner ma vie, d’être libre et de pouvoir offrir à mes enfants la situation la plus confortable possible."

Après avoir grandi du côté de Maura, à quelques kilomètres de la frontière avec l’Espagne, le jeune Manuel quitte l’école dès 16 ans. Il s’essaie ensuite à différents métiers du bâtiment, entre maçonnerie et peinture. Cinq ans plus tard, une discussion en famille éclaire son destin. Son beau-frère est alors à la tête d’une station-service BP en France. "Voir son parcours a été un élément déclencheur, se souvient-il. Même si son affaire était petite, j’ai compris qu’il y avait pas mal d’avantages à être à son compte."

Un vrai commerce de proximité

Déjà libre mais jamais seul, Manuel Diogo peut en outre compter sur le soutien sans faille de son épouse Clarinda pour rejoindre l’Hexagone. Motivé à l’idée "de construire quelque chose ensemble", le couple postule pour intégrer le réseau Shell et est finalement retenu. En 1990, les voilà nommés à la tête de la station du groupe britannique de Creil, dans l’Oise, avec le statut de gérant-mandataire. Une porte d’entrée dans l’entrepreneuriat plus simple d’après le dirigeant.

"Vous êtes votre propre patron, mais le fonds de commerce ne vous appartient pas, ce qui limite l’investissement de départ." Rapidement, les Diogo trouvent leur place et leur affaire se fait un nom. Le contexte aide aussi à une époque où les stations-service avaient encore une vraie valeur aux yeux des automobilistes. "Dans les années 1990, on y venait pour faire son plein mais pas seulement. La station était aussi un lieu où on prenait un café, on discutait, on créait du lien", ajoute le dirigeant.

Avec son sens de la relation client et du commerce de proximité, ce dernier réussit à fidéliser sur son métier d’origine mais aussi en se diversifiant avec un atelier. Une expérience moins aisée mais instructive. Manuel Diogo apprend ainsi tous les rudiments de la mécanique sur le tas. L’année 2000 sonne comme un changement de millénaire et comme un nouveau départ pour le couple. Désirant revenir sur leur terre natale, les Diogo quittent Creil. Ils investissent dans une nouvelle affaire à Moura avec un garage AD et une station de lavage.

Attentif à son équilibre familial, Manuel Diogo reconnaît que ce virage a été difficile alors que ses enfants – Bruno, l’aîné, et Victoria, la cadette – n’avaient jusque-là connu que la France. Mais ce retour au pays s’avérera difficile pour une autre raison. En 2004, Clarinda tombe malade. Entre la complexité de devoir tout gérer seul et la difficulté pour son épouse d’être soignée dans les meilleures conditions, Manuel Diogo met fin à cette aventure en 2006.

À Neuilly, pour un nouveau défi

Voilà tout le monde de nouveau en France, mais cette fois-ci dans les Yvelines, au Mesnil-le-Roi, dans un environnement calme pour la famille et porteur pour le business. Le chef d’entreprise prend la tête de la station locale de l’enseigne Total qui vivotait sous l’ancienne direction et était largement sous-exploitée. Là encore, la trajectoire est rapidement inversée et un cycle de croissances ininterrompues va s’enclencher. De quoi taper dans l’œil de la compagnie pétrolière.

Consciente d’avoir dans ses rangs un précieux membre, celle-ci décide alors de lui confier un autre site. En 2014, Manuel et Clarinda Diogo reprennent la gérance de la station Total de Neuilly-sur-Seine avec un enjeu particulier. Il n’est alors ici pas question de relancer l’affaire. La station est implantée en plein centre-ville et peut compter sur une clientèle solide. Le défi proposé aux Diogo est alors d’y développer en parallèle de la distribution de carburant une seconde activité de réparation rapide. Une idée concrétisée par un partenariat noué avec l’enseigne Speedy.

Parti de zéro, cette activité va très vite décoller avec 300 000 euros de chiffre d’affaires au bout d’un an et un rythme de croisière situé aux alentours du million d’euros. Et même si les efforts consentis à Neuilly auront un revers, celui de devoir délaisser la station du Mesnil-le-Roi faute de temps pour gérer les deux, l’histoire est et demeure toujours un succès. Quant au défi de gérer plusieurs sites en même temps, tout n’était qu’une question de timing.

Pour Manuel Diogo, le train est repassé quelques années plus tard. En 2018, une connaissance l’avertit qu’un garage Speedy est à vendre au Chesnay (78). Installé le long de la départementale 307, non loin de l’autoroute A13, le centre est bien implanté et tourne fort. L’aura et la réputation de Speedy constituent aussi un plus fondamental. De quoi faire dire au dirigeant que "le risque était relativement mesuré". De quoi aussi l’inciter à saisir cette opportunité.

L’humain au centre de tout

En juillet, l’histoire est réglée. À défaut d’avoir un don d’ubiquité, Manuel Diogo s’organise. Il s’entoure de responsables dans chaque site. Alors que Neuilly continue de performer, la croissance s’enclenche au Chesnay avec un chiffre d’affaires qui passe de 900 000 euros en 2018 à 1,4 million en 2024. Une réussite collective à l’en croire.

Car, on y revient, s’il a souhaité voler de ses propres ailes pour des ambitions bien personnelles, Manuel Diogo est toujours resté convaincu de la force du groupe. On n’est rien sans les autres, ici ou ailleurs. "Le personnel est au centre de tout, dit celui qui gère 20 personnes dans les Hauts-de Seine et six autres dans les Yvelines. Quand vous n’avez pas les bonnes personnes, que les relations ne sont pas bonnes, ça ne peut pas fonctionner. Les clients le ressentent et cela a forcément un impact sur l’activité."

Mais dans un univers où les talents manquent, l’humain se soigne avec du concret. "Pour réussir à fidéliser les équipes, il faut qu’elles se sentent bien. Ça passe par la question du salaire, qui reste cruciale, et par tout un tas d’avantages." Les salariés des centres de la famille Diogo sont ainsi chouchoutés avec des rémunérations confortables, des primes de résultat, 50 euros de carburant offerts chaque mois, des tickets restaurant…

Fin 2025, Manuel Diogo fêtera son soixantième anniversaire. Un cap à passer avec ce que cela implique. La transmission et la retraite n’effraient pas le dirigeant. La première question est déjà réglée et passera par une vente, puisqu’aucun de ses enfants ne reprendra le flambeau alors que Bruno évolue dans le digital numérique et Victoria dans le commerce international.

Quant à la seconde, Manuel Diogo est un homme suffisamment actif pour ne pas s’inquiéter de la retraite. "Ça arrivera quand ça arrivera" dit-il. Entre la chasse, la pêche, les footing et ses retours tous les deux ou trois mois à Moura, son quotidien est déjà bien rempli. À l’heure où cela arrivera, il pourra ainsi tourner la page sereinement. Il repensera alors aux ambitions du jeune Manuel et se dira que, 35 ans plus tard, il est resté fidèle à celui-ci.

 

Cet article est extrait du Journal du Pneumatique n°190 de mai-juin 2025.

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager : 

Sur le même sujet

cross-circle