Le pneumatique, victime collatérale d'un contexte national morose

Du vert au rouge, il n'y a qu'un pas. Alors que l'année 2024 avait permis au marché français du pneumatique de renouer avec la croissance, l'embellie n'aura finalement été que de courte durée. Selon les chiffres compilés par le Syndicat du Pneu et GfK, le segment TC4 (tourisme, 4x4/SUV, camionnette), principal pourvoyeur de ventes dans l'Hexagone, a vu ses volumes fondre de 4,8 % en sell in (des manufacturiers aux revendeurs) à hauteur de 14,8 millions d'unités, et de 4,7 % en sell out (des revendeurs aux utilisateurs) pour un total de 7,7 millions d'unités.
Des tendances assez exceptionnelles à en croire Régis Audugé. Le directeur général de l'organisation professionnelle rappelle ainsi que les évolutions à la baisse ou à la hausse du secteur ne sont jamais extrêmement marquées. Sauf que l'industrie de la gomme est aujourd'hui une victime collatérale d'un contexte national aussi incertain que morose, qui freine la consommation des ménages.
Toujours moins de premium, toujours plus de budget…
"Le pneumatique est un achat contraint et sa dynamique se corrèle très souvent avec celle de l'activité économique, note Régis Audugé. Or, aujourd'hui, les prévisions de croissance, les incertitudes politiques et géopolitiques ainsi que le contexte social font que les consommateurs décalent ce type d'achats et cela se répercute directement sur les ventes."
Et pour ceux qui se plient malgré tout à un changement d'enveloppes, à l'heure où toutes les dépenses pèsent mois après mois un peu plus lourd, le choix du pneumatique est de plus en plus guidé par cette donnée. Un exemple frappant tient dans la construction du marché selon les niveaux de marques. Alors que les volumes en premium ont diminué de 5,4 % entre le 1er janvier et le 30 juin, ceux en budget se sont envolés de 12,1 %. Les marques d'entrée de gamme représentent donc désormais 22 % des ventes, contre seulement 13 % quatre ans en arrière.
Près de quatre ventes sur dix en toutes saisons
Autre enseignement, les tradebrands (MDD) sont dans le dur avec une baisse de 3,8 %, et les marques B ou quality n'ont plus la cote. Ces dernières ont dévissé de 16,5 % sur la première moitié de l'année, pour un taux de pénétration aujourd'hui évalué à 19 %. Une situation qui s'explique par un positionnement inconfortable. Ne profitant pas de l'aura des premium, les quality sont en outre bien moins compétitives sur le plan tarifaire que les budget avec un prix moyen de 100 euros pour les premières et de 61 euros pour les secondes. Un écart qui, de surcroît, ne cesse de s'agrandir.
Sur le plan de la saisonnalité, aucune surprise au cours du dernier semestre avec un segment toutes saisons qui continue d'avancer tel un bulldozer avec des ventes en hausse de 12,1 % et une part de marché qui atteint à présent 39 %. Pendant ce temps, l'été et l'hiver ont perdu du terrain, affichant respectivement un recul de 6,1 % et de 5,3 %. Autre point important, le prix moyen d'un pneu toutes saisons (102 euros) est passé sous celui de l'été (104 euros), nouvelle preuve de sa banalisation.
Des perspectives peu encourageantes
Du côté des canaux de distribution, un statu quo est observé. Sur les ventes de pneus tourisme, les centres autos dominent toujours avec 45 % de PDM, devançant les pneumaticiens (32 %) et les pure players (23 %). Mais les seconds, reconnus pour leur expertise et positionnés sur des produits plus haut de gamme, tirent leur épingle du jeu sur le segment des marques premium et sur celui des 4x4/SUV en captant quatre ventes sur dix sur les panels étudiés par le Syndicat du Pneu et GfK.
Sur ces résultats peu engageants, les prévisions pour la seconde moitié de l'année 2025 s'avèrent assez défavorables. Les raisons justifiant le déclin des six premiers mois demeureront d'ici au 31 décembre et Régis Audugé ne fait pas de mystère sur ce qui attend l'industrie du pneumatique. Le marché tricolore devait ainsi boucler l'exercice dans le rouge tout en attendant des jours meilleurs.
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