Pneus usés : Bruxelles renforce le dispositif de tests et valide la position de Michelin
Bruxelles a tranché. Les pneumatiques seront désormais évalués sur la durée, et donc non plus uniquement à leur état neuf, mais également à l'état usé. Le 1er juillet 2024, la réglementation européenne R117-04 sur les performances des enveloppes a été revue. Alors que celle-ci intégrait déjà des notions de résistance au roulement, d'impact sonore et d'adhérence sur sol mouillé, la récente mise à jour va challenger les produits mis sur le marché en évaluant leurs qualités une fois usés.
Concrètement, le test de freinage sur sol mouillé retenu par les autorités européennes mesure la distance nécessaire à la décélération d’un véhicule passant de 80 à 20 km/h sur un revêtement routier standard avec une hauteur d’eau d’un millimètre. Outre ces spécificités, ce test comporte d’autres paramètres précis comme le coefficient d’adhérence de la route ou la température ambiante. Ce dispositif, déjà appliqué sur les pneus neufs, permet d'apprécier précisément les performances des pneus usés jusqu'à la limite légale de 1,6 mm de profondeur de gomme.
Bon pour la sécurité… et pour la planète !
Importante pour la sécurité, cette évolution l'est également pour l'environnement. Car en évaluant les pneus jusqu'à leur limite légale, Bruxelles entend aussi lutter contre un phénomène bien connu du monde du pneumatique qui consiste à changer d'enveloppes bien avant que cette limite soit atteinte. Certaines études jugent que 50 % des pneus sont démontés avant d'avoir atteint 3 mm de profondeur résiduelle. Grâce à cette réglementation, la vente de pneus neufs pourrait être réduite de 128 millions d'unités en Europe. De quoi économiser 6,6 millions de tonnes de CO2 chaque année.
À l’échelle mondiale, 400 millions de pneus sont démontés prématurément annuellement et 35 millions de tonnes de CO2 pourraient ainsi être épargnées. Un volume qui correspond aux émissions d’une ville comme New-York pendant six mois. Garder ses pneus plus longtemps permettra également de préserver le pouvoir d’achat des consommateurs. Ce sont ainsi près de sept milliards d’euros qui pourraient être économisés par les automobilistes européens chaque année, rappelle Michelin.
Le lobbying gagnant pour Michelin
Le groupe tricolore a d'ailleurs salué les efforts des autorités européennes. Celui-ci militait depuis de longues années en ce sens. Son lobbying a donc porté ses fruits. "Pour le groupe, il est nécessaire d’informer les consommateurs sur l’importance de la performance de leurs pneus à l’état usé. Cette transparence est d’autant plus essentielle que certaines capacités se dégradent au fil des kilomètres, notamment en matière de sécurité" développe Bibendum.
Pour justifier sa position, Michelin a souvent rappelé que l'évaluation d'un pneu une fois usé constituait le juge de paix de la performance et de la durabilité. Alors que l'usure représente à elle-seule entre 75 et 90 % de l'impact environnemental du pneumatique, le clermontois a réussi depuis trois décennies à diviser par deux la résistance de ses enveloppes. Toutefois, selon une étude menée par Dekra sur plus de 2 000 pneus, les résultats sont très disparates d'une référence à une autre.
Pour un jeu de quatre pneus et 20 000 km/an, une enveloppe Michelin émet 1,5 kg de particules contre 3,5 kg pour la moyenne et jusqu'à 8 kg pour les moins bons ! De quoi expliquer aussi pourquoi, tous les ans, le groupe tricolore consacre 1,2 milliard d'euros en R&D pour améliorer ses produits.