Nicolas Dupuy, les ambitions de la maturité
Il a l’assurance de ceux qui ont de l’expérience et l’humilité de ceux qui pensent qu’on peut toujours évoluer. Quels que soient l’âge ou les lignes sur le CV. Lui-même le confie : "On apprend tous les jours." Nicolas Dupuy est un personnage qui vaut le détour. Pour son parcours tout autant que ses idées. Derrière un accent chantant, se dessine un discours franc, direct, sans angélisme, profond aussi, et par-dessus tout, terriblement passionné.
Aussi loin qu’il se souvienne, cette appétence pour la mécanique, pour le fait de démonter et de remonter, de parfois casser et de souvent réparer, ont toujours fait partie de sa vie. Enfant, Nicolas Dupuy grandit aux côtés de parents très éloignés de cet univers mais qui lui offrent la liberté d’expérimenter. "À 12 ans, j’avais déjà remonté complètement ma mobylette, se remémore-t-il. La chance que j’ai eue, c’est que mes parents me regardaient toujours avec de grands yeux, mais me laissaient faire."
Une latitude qui pourrait servir d’exemple tant elle a fait naître, dans le cas présent, une véritable vocation. "Je n’ai jamais pensé faire un autre métier" abonde-t-il. Très tôt, Nicolas Dupuy sait que la réparation sera son univers. CAP et BEP en poche, le jeune homme arrive rapidement à se projeter plus loin que la moyenne.
Désireux dès le début de sa carrière de voler de ses propres ailes, il complète sa formation mécanique par une autre en carrosserie. "Je voulais absolument me mettre à mon compte mais je savais qu’il me fallait maîtriser toutes les facettes de ce métier que ce soit face à un client ou un salarié."
De l’atelier au bureau
En 1999, ce premier objectif est atteint. Du haut de ses 22 printemps, il vend sa voiture et investit 100 000 francs (15 000 euros) pour reprendre un petit garage situé dans la commune vauclusienne de Sorgues. Sûr de sa force de travail, le néo-entrepreneur se débrouille pour équiper son affaire et réussit à la faire tourner rapidement en ne comptant pas ses heures.
Il se frotte aussi à cette époque à une autre facette de son nouveau rôle. De l’atelier au bureau, la transition n’est pas des plus aisées. Il apprend sur le tas de nombreuses choses liées à l’administratif, au secrétariat ou au juridique.
"Franchement, ce n’était pas ce que je préférais et c’était assez complexe de bien assimiler tout ça, souligne-t-il. Mais ça fait partie du métier et on peut y perdre beaucoup de temps et d’argent à prendre ça à la légère. Quand vous terminez votre journée à 19h ou 20h et qu’ensuite vous avez plusieurs heures de paperasse… ça demande énormément d’organisation et celle-ci ne s’acquiert qu’avec l’expérience".
Assez lucide sur sa propre évolution, Nicolas Dupuy estime ainsi être devenu un chef d’entreprise à part entière aux alentours de la trentaine. Et paradoxalement, c’est à ce moment précis de sa vie qu’il tourne cette première page de sa carrière. En 2007, il vend son garage et part vivre au bord de la mer. Ce père de trois enfants s’installe avec sa famille dans l’Hérault et ouvre une nouvelle affaire à Mèze, tout près de Sète. Comme pour la première, celle-ci va être développée selon les idées du patron.
Attentif aux équipes
L’une des principales tient à la confiance placée dans les hommes et les femmes qui l’entourent. Avec les plus jeunes, Nicolas Dupuy se montre attentif et travaille à les faire grandir. Passé par la case alternance, le chef d’entreprise s’appuie lui-aussi sur ce dispositif de formation. Par conviction plus que par croyance.
"L’alternance est un formidable tremplin pour les jeunes. J’ai beaucoup d’estime pour eux et pour cette filière. Après, je trouve toujours dommage de voir le fossé qu’il y a entre le cursus dispensé à l’école et les besoins concrets du terrain. 99 % des connaissances de nos alternants sont acquises chez nous."
Avec tous les autres, les jeunes comme les moins jeunes, le sudiste se montre attentif et à l’écoute. Ce que confirme sa collaboratrice Daisy Fulcrand. Découverte dans nos colonnes (voir l’interview WhatsApp du JDP n°172), la responsable commerciale de l’entreprise détaille le mode de fonctionnement de son patron.
"Nicolas est très exigeant, il sait ce qu’il veut mais il est aussi très humain, note-t-elle. Le bien-être des équipes est au cœur de ses préoccupations. Même si c’est lui qui tranche au final, il laisse à chacun la possibilité de s’exprimer et de donner son point de vue." "Tout le monde peut apporter sa pierre à l’édifice, ajoute le principal intéressé. La bonne idée peut autant venir du plus expérimenté que de la dernière recrue."
Seuls les imbéciles ne changent jamais d’avis
En termes d’idées, outre ce soin accordé aux équipes, ce qui l’anime aussi profondément tient dans cette notion d’indépendance. Nicolas Dupuy est resté pendant deux décennies accroché à la conviction que, pour avancer totalement librement, il ne fallait porter aucun panneau d’enseigne nationale. Sauf qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent jamais d’avis.
2019 marque une étape très importante dans le cheminement du dirigeant. Il n’y avait bien qu’un seul réseau qui pouvait le convaincre d’évoluer. Première enseigne indépendante de l’Hexagone, bâtie et dirigée par ses propres membres, Point S est ainsi venue frapper à sa porte. Avec des arguments en béton. "Mes préjugés se sont très vite envolés", admet-il.
Dans la mesure où son garage de Mèze ne répond pas totalement aux attentes de Point S, car n’ayant pas pignon sur rue et étant en surcharge de travail, Nicolas Dupuy se voit proposer de reprendre un site situé à une cinquantaine de kilomètres plus au nord, à Lodève précisément. Le garage est mal géré et assez mal en point mais le challenge plaît au dirigeant, sans doute conforté en cela par le soutien de sa nouvelle enseigne. En un mois, la discussion est réglée. Et rapidement, les entrées décollent.
Changement de paradigme
"J’ai compris très rapidement, et un peu malgré moi, ce que ça pouvait apporter d’être membre d’une enseigne nationale. Un jour, un client me confie qu’on est à ses yeux un bon garage mais que c’est normal puisqu’on est un garage Point S. Dans ma tête, je pensais que c’était un non-sens car mes collaborateurs n’ont rien à voir avec Point S… Sauf que cette remarque était le reflet de la force d’un concept et de l’image d’un réseau."
Depuis cinq ans, le centre de Lodève est passé de 200 000 à un million d’euros de chiffre d’affaires et son équipe de deux à six salariés. Fort de cette réussite, Nicolas Dupuy a franchi un nouveau cap en 2022 et 2023. Ces deux dernières années, il a ouvert et repris deux centres supplémentaires à Mèze (en parfait complément de son premier garage qui demeure sans panneau) et à Béziers.
Un véritable changement de paradigme, lui qui est longtemps resté monosite avant de diriger un petit groupe employant aujourd’hui 16 personnes. La force de Nicolas Dupuy est aussi de réussir à être présent partout. "Il prend le temps de passer dans chacun des sites" note Daisy Fulcrand.
"Cette nouvelle organisation m’a obligé à tout revoir. On n’est plus du tout le même dirigeant avec un seul ou plusieurs sites. Le fait de ne pas être tout le temps présent dans un garage oblige à gérer différemment le travail, les problèmes, les équipes, le stress du quotidien…"
À 47 ans, Nicolas Dupuy est un chef d’entreprise qui a toujours autant envie d’avancer. S’il ne le dit pas, il y a fort à parier qu’un nouveau développement est déjà en préparation. "Il anticipe toujours les choses et ses ambitions portent l’ensemble de l’équipe" complète sa collaboratrice. "Je vois la suite avec Point S et j’espère qu’on va continuer d’avancer ensemble" conclut-il. Nul doute que le meilleur reste à venir.
BIO EXPRESS
Nicolas Dupuy, 47 ans (Point S)
1999 Ouvre son premier garage à Sorgues (Vaucluse).
2007 Déménage dans l’Hérault et ouvre un nouveau garage à Mèze.
2019 Rejoint Point S avec la reprise d’un centre situé à Lodève.
2022 Inauguration d’un deuxième Point S, à Mèze.
2023 Reprise d’un troisième Point S, à Béziers.
Cet article est extrait du Journal du Pneumatique n°185 de mai-juin 2024.