Michelin se démarque de la concurrence sur l'électrique
Comme ses homologues haut de gamme, le manufacturier clermontois oriente ses produits vers l'annulation de leur empreinte environnementale d'ici à quelques dizaines d'années. Parallèlement, la course à la réduction des émissions de CO2 entraîne Michelin à surmonter aussi les contraintes de l'électrification automobile. Pari réussi, puisqu'"en douze ans, Michelin a obtenu plus de 340 homologations de véhicules électriques. Nous sommes présents sur 80 % de l'offre en équipant 15 des 22 constructeurs de VE Premium", expose Serge Lafon, directeur ligne business première monte de Michelin.
Plus lourd que le thermique
Le fabricant promet donc des pneus "100 % durables et recyclables" en 2050, pour les VE… ainsi que pour les autres motorisations. Il tend donc ses efforts pour surmonter les spécificités du véhicule électrique. En effet, ce dernier est plus lourd que son homologue thermique. "Le réservoir de 50 litres des véhicules thermiques y est remplacé par dix fois plus de poids et trois à quatre fois plus de volume", souligne Serge Lafon. Il développe aussi plus de couple, avec des accélérations et des freinages plus intenses.
Leurs pneumatiques subissent donc des contraintes plus rudes. Ses pneus s’usent en proportion, soit environ 20 % plus que sur les motorisations traditionnelles. Objectif pour le manufacturier : maintenir leur niveau de sécurité, améliorer leur longévité, leur autonomie, réduire leur bruit, en tenant compte de leur couple et de leur masse.
80 % de l’impact environnemental hors de contrôle
Pour atteindre ses objectifs environnementaux, le fabricant agit sur l'ensemble du cycle de vie du pneumatique, depuis avant sa naissance jusqu'à sa revalorisation. Il utilise des matières premières de plus en plus durables. Parallèlement, le manufacturier s'engage aussi dans la création des filières de collecte et de revalorisation des enveloppes usagées. Autant de domaines, où de nouveaux progrès techniques sont encore attendus, pour optimiser recyclage et valorisation.
Néanmoins, 80 % de l'impact environnemental des pneus se produit pendant leur utilisation, "hors des murs de Michelin" et de son contrôle. Serge Lafon déplore ainsi que "la moitié des pneus sont mis au rebut avant d'avoir atteint 3 mm de profondeur résiduelle. 400 millions de pneus sont ainsi annuellement démontés alors qu'ils pourraient encore rouler". Attachés à leur sécurité, leurs utilisateurs évitent ainsi d’atteindre la limite d'usure de leurs enveloppes, pour conserver leurs propriétés.
Or, pour le dirigeant, "le pneu que l’on ne produit pas reste le plus vertueux pour l’environnement." D’où les efforts de la marque pour améliorer leur durée de vie. Les services de R&D du groupe se focalisent donc sur quatre points pour améliorer la durabilité des pneus. Ils améliorent leur longévité (en réduisant leur usure), leur résistance au roulement, leurs capacités de charge, tout en réduisant leurs émissions sonores.
30 % d’usure en moins
Parmi les progrès majeurs réalisés par la marque figure la mise au point de pneus conservant leurs performances durant toute leur vie. Ensuite, le fabricant recherche de nouvelles formules pour réduire l'abrasion de ses enveloppes. Il affirme réussir à la réduire de 30 % en comparaison avec ses concurrents.
Ainsi, quatre pneus Michelin Cross Climate 2 montés sur un véhicule parcourant 20 000 km émettraient seulement 1,5 kg de particules. Cela, alors que d'après une étude de l'Adac, les pneus fabriqués depuis 2013 utilisés dans les mêmes conditions en produiraient en moyenne 3,5 kg. Tandis que les moins performants atteignent jusqu'à 8 kg.
Enfin, le fabricant évoque aussi ses progrès en matière de réduction de la résistance au roulement. Il serait parvenu à la diviser par deux en 30 ans. Ainsi, dès 1992, lors de la sortie de son pneu Energy, celui-ci affichait une résistance de 12 kg/t. Aujourd'hui, les modèles e.Primacy et Pilot Sport EV atteignent 5,5 kg/t. Ces gains permettent de réduire les 20 % d’énergie motrice du véhicule absorbée par ses enveloppes. Les VE y gagnent ainsi davantage d’autonomie. Tandis que leurs homologues thermiques consomment moins de carburant au kilomètre.
Bénéfices pour VE et thermiques
Or, c'est précisément sur ce point que Michelin se démarque de nombre de ses concurrents. En effet, Serge Lafon déclare : "Nous ne réservons pas ces progrès technologiques aux VE. En les installant sur les véhicules thermiques, on réduit aussi leur empreinte environnementale. Et cela, tant pour les gammes été, hiver, toutes saisons et sportive, selon les usages des clients, quels qu'ils soient".
Mieux, le manufacturier ne fait pas de distinction entre ses pneus pour VE et ceux pour modèles thermiques. Il affirme qu’en suivant les recommandations des constructeurs (et en respectant évidemment les dimensions des roues), il est possible d'installer ses enveloppes indifféremment sur ces deux types de véhicules.
Simplification à tous les étages
Cette stratégie rompt avec celle de nombreux concurrents. En effet, beaucoup proposent des gammes distinctes, réservées aux VE… Alors que le fabricant clermontois affirme agir sur l'impact environnemental de tous les véhicules chaussant ses pneus. Son offre s’adapte plus simplement à la période de mix énergétique prévue, jusqu'après l'électrification totale des VN en 2035.
Chez les pneumaticiens, cette position simplifie aussi la gestion des stocks. En effet, ceux-ci n’ont pas à multiplier les nombreuses gammes entreposées. Enfin, l’argumentaire commercial vers les automobilistes, autour de ces pneus, est également simplifié.
Reste que ces développements nécessitent de répercuter leurs coûts sur le prix du produit. Cela, notamment face à la concurrence des pneus budget, souvent moins respectueux de l’environnement. Dès lors, il reste encore au manufacturier d’insister sur le coût de détention de ses enveloppes… Une notion intégrée par la plupart des gestionnaires de flotte, mais pas encore par la majorité des automobilistes.