Patrick Lhoste, Yokohama France : "Les meilleures conditions et les meilleurs outils pour réussir"

Comment s'est comportée votre activité en 2024 ?
Yokohama France a fait une très bonne année. Nos résultats suivent ceux du marché français avec un toutes saisons qui progresse toujours vite mais globalement nous avons enregistré de la croissance sur tous les segments. Nous sommes d'autant plus satisfait de ce bilan que nous avons rencontré des difficultés d'approvisionnement avec des produits qui sont arrivés tardivement et en quantités inférieures à ce que nous avions commandé. Sans ça, nous aurions pu faire encore mieux.
Quelles sont les tendances plus précisément ?
Au global, nous avons enregistré une progression de 30 % en chiffre d'affaires et de 28 % en volumes. L'été, qui représente plus d'une vente sur deux chez nous, est porté par les gammes Advan et BluEarth avec des croissances significatives pour l'une et l'autre. Le toutes saisons continue de prendre du poids avec une progression de 41 % sur un an et désormais un tiers de nos ventes. Enfin, l'hiver se porte également très bien avec une hausse de 34 % entre 2023 et 2024. Je pense d'ailleurs que le lancement du nouvel Advan Winter V907 va aussi nous aider à confirmer cette tendance.
Les résultats enregistrés sur l'hiver prouvent qu'il existe toujours une demande sur ce marché si spécifique…
En réalité, c'était un marché déjà structuré et la croissance du toutes saisons n'a rien changé à cela. Entre ceux qui habitent dans des régions montagneuses et ceux qui utilisent beaucoup leur voiture pour leur travail notamment, il y a encore des utilisateurs qui savent qu'ils peuvent être piégés à tout moment par des conditions météorologiques difficiles et qui connaissent l'importance d'être bien équipés.
Tous ces clients avaient l'habitude de rouler en pneus hiver et ils n'ont pas switché vers du toutes saisons. Le pneu hiver à l'avantage de rester performant tout au long de son cycle de vie et offre davantage de garanties de sécurité pendant la période hivernale.
En définitif, je pense qu'un automobiliste en pneus été à plus de raisons de changer ses habitudes, parce que c'est plus commode, plus intemporel, plus simple quand on ne part qu'une semaine par an à la montagne, qu'un autre en pneus hiver.
Historiquement, la stratégie de votre groupe a toujours été guidée par l'expertise, la passion ou encore le sport automobile. Est-ce que les marchés de masse vous intéressent-ils vraiment ?
C'est évident que Yokohama cible le marché élitiste des véhicules haut de gamme. Être historiquement proche du monde de la compétition, et en être même un acteur important avec la Super Formula ou les GT300 et GT500, fait que la notion de performance est omniprésente chez nous.
Le mass market n'est clairement pas une cible pour le futur. Notre direction a un background dans d'autres groupes très orientés haut de gamme et elle applique une politique en parfaite corrélation avec cette idée. Et c'est d'autant plus justifié qu'il existe un vrai potentiel sur ce marché premium.
Pour parfaite votre place en Europe, le déploiement dans le futur d'une usine sur le continent est-il un projet capital ?
C'est un grand objectif. Nous avons de nombreux et de très beaux partenariats en Europe, notamment avec des constructeurs allemands et c'est un vrai problème pour Yokohama de ne pas avoir de site de production ici. Les estimations indiquent qu'un tel outil pourrait permettre de fabriquer un million de pneumatiques supplémentaires rien que pour la première monte. Tout en étant plus proche de nos clients.
Aujourd'hui, c'est clairement la dernière brique qu'il nous manque. La progression de nos volumes en Europe va permettre de concrétiser plus rapidement ce projet et donc d'être plus compétitif, notamment vis-à-vis des frais de transport et des problèmes liés au fret maritime qui nous pénalisent énormément.
Après, est-ce que le choix sera de partir de zéro ou de réorganiser notre schéma industriel ? La question est posée. Avec les rachats ces dernières années dans les pneus hors route (Alliance Tire Group en 2016, Trelleborg Wheel Systems en 2022, Goodyear OTR en 2024), nous avons des unités de production en plus sur le continent et celles-ci pourraient peut-être nous offrir des opportunités.
Vous concernant, vous êtes passé à l'été 2023 de distributeur indépendant de la marque à filiale à 100 % de Yokohama Europe après avoir revendu les parts de votre société. Que vous apporte ce changement ?
Le fait d'être filiale à 100 % fait que nous sommes bien plus aidé par le siège. Bien sûr, je suis devenu salarié du groupe mais pour le reste c'est un vrai plus. Quand nos clients parlent à Yokohama France, ils parlent directement à Yokohama Europe. Aujourd'hui, ce changement représente un investissement et ma direction nous donne les meilleures conditions et les meilleurs outils pour réussir. D'où notre forte progression sur le dernier exercice. Ces meilleures conditions nous ont notamment permis de séduire de grands noms de la distribution comme Distri Cash et Massa.
Que pèse réellement Yokohama sur le marché français ?
Yokohama France pèse aux alentours de 1 % du marché hexagonale contre 0,6 % il y a encore deux ans. Avec notre nouvelle direction européenne, nous avons une stratégie très claire. Les résultats se sont nettement améliorés sur plusieurs marchés clés du continent. La France n'y échappe pas. Après, notre difficulté en tant que Français est de devoir faire face au grand manufacturier national… C'est difficile de se faire une place mais on y arrive progressivement.
Le cap des 1 % de part de marché était un palier important. Comment voyez-vous la suite ?
On peut regarder ce qui se passe dans d'autres marchés. En Scandinavie, Yokohama s'octroie quasiment 6 % de part de marché. En Allemagne, marché qui ressemble à la France, elle est de 3,5 %. Et au global en Europe, elle s'élève à 2 %. Tout ça nous donne une idée de ce vers quoi on peut aller. Au-delà de ces chiffres, au-delà de la qualité de nos pneus qui a toujours été exceptionnelle, l'enjeu porte sur la satisfaction client. Avoir le bon produit au bon moment demeure au centre de nos préoccupations. On est parfois dépassé par notre succès mais je suis vraiment optimiste pour la suite.