Avec l’iOn, Hankook investit sur l’avenir
A la bonne place, au bon moment. Tandis que les acteurs dominants du marché tricolore ont perdu quelques plumes en 2022 au cours d’un exercice où les automobilistes ont préféré, face à une inflation galopante, changer leurs habitudes et miser de plus en plus sur des marques secondaires (budget principalement), Hankook a de son côté récolté les fruits d’une stratégie savamment mise au point.
Ce qui était hier un problème pour le groupe sud-coréen est peut-être aujourd’hui son principal atout. Où le positionner sur l’échiquier du pneumatique européen ? Une question qui anime souvent nos colonnes. Parmi les secondes lignes, selon les cinq premium, qui s’en tiennent à la classification officielle ? Ou parmi ces mêmes premium, selon le principal intéressé ? Il est vrai que de par ses volumes, ses résultats, ses investissements, son organisation, son rayonnement et surtout les performances de ses enveloppes, Hankook a tout d’un roi sans couronne, un premium officieux.
Et si cette situation a pu, et peut encore susciter quelques crispations dans les rangs de la firme sud-coréenne, elle joue maintenant en sa faveur. Avec une politique tarifaire inférieure à celle du haut du panier mais un savoir-faire au moins équivalent, elle se place de facto comme une alternative crédible pour les énamourés de Bibendum et consorts. Le parallèle avec Michelin est d’ailleurs intéressant à plus d’un titre, car Hankook a eu un temps le clermontois à son capital, ce qui lui sert encore de formidable mètre étalon, avec une exigence poussée à l’extrême partagée par les deux groupes.
Une montée en compétences salvatrice
Celle-ci doit également beaucoup à un virage pris par l’industrie sud-coréenne à la fin des années 90. À l’image de Samsung, devenu le numéro un des smartphones entre autres, Hankook a pris à cette époque un virage en montant en compétences. Un préalable pour s’ouvrir au monde. Désormais septième acteur mondial avec 102 millions de pneus écoulés en 2022, le manufacturier rayonne sur toute la planète avec 8 usines, 5 centres de recherches, 2 pistes d’essais et des bureaux régionaux sur tous les continents.
En Europe, et en France tout particulièrement, un autre virage s’est opéré à compter de 2010, année à partir de laquelle son image a commencé à évoluer. Lors de la dernière décennie, la qualité perçue de ses produits s’est largement rapprochée des leaders du marché tandis que sa notoriété a décollé, grâce à son offre mais aussi à des investissements marketing de grande envergure (dans le football notamment, avec le Real Madrid ou la League Europa).
Aujourd’hui, voilà Hankook parmi les ténors du secteur dans l’Hexagone avec 11 % de part de marché et un ratio de ventes qui suit, peu ou prou, la tendance générale avec 58 % d’été, 27 % de toutes saisons et 15 % d’hiver. Pour conforter sa place, le groupe s’est lancé il y a déjà dix ans dans un grand projet, avec un budget colossal d’un milliard de dollars, qui donne aujourd’hui naissance à l’iOn.
Un produit à part pour des clients à part
Ce pneumatique dédié aux véhicules électriques, commercialisé depuis le second semestre 2022, porte les ambitions futures d’Hankook. L’an passé, en France, la part de marché des modèles électrifiés – qu’ils soient 100 % électriques, hybrides rechargeables ou hybrides non rechargeables – s’est élevée à 42 % et près de 640 000 immatriculations. De quoi offrir de nombreuses opportunités de croissance !
Considérant par ailleurs la vitesse de développement de ces technologies et la segmentation du parc (le spectre allant des médium aux ultra-sportives, pouvant représenter 80 % de la production mondiale de VE d’ici 2028, selon le cabinet IHS), Hankook s’est lancé dans cette aventure qui n’est pas totalement une découverte pour lui. En effet, le manufacturier s’appuie déjà sur une gamme pouvant convenir à ces véhicules avec le Ventus S1 Evo EV.
"Mais nous voulions aller plus loin", affirme Georges Bochaton, directeur ventes et marketing d’Hankook France, qui pousse le raisonnement : "L’iOn est un produit à part. Avec lui, nous démontrons notre capacité à apporter des améliorations significatives sur de nombreux points. C’est très important car l’utilisateur d’un VE n’est pas un automobiliste lambda. Il a fait le choix d’acheter une voiture électrique, soit par conviction écologique, soit pour des questions de coût d’utilisation, et on veut apporter des réponses très poussées aux besoins de cette frange d’utilisateurs."
Pas de compromis !
Avec l’iOn, Hankook a choisi de ne faire aucune concession pour aboutir à un produit capable finalement d’associer tenue de route et faible résistance au roulement, adhérence et performance kilométrique ou confort sonore et performance sur sol mouillé. Et de faire tout ceci avec des montes été, mais aussi avec des montes hiver. Un challenge autrement plus grand, qui reste à ce jour une première sur le marché.
Alors bien sûr, cette offre n’en est actuellement qu’à ses balbutiements, à ses premiers pas dans un univers très bataillé. À court terme, elle ne bouleversera pas la place de Hankook. À moyen et long terme, en revanche, cette innovation pourrait bel et bien changer la donne. "On parle là d’un marché qui, d’une certaine façon, n’existe pas. Il y a encore tout à construire, souligne Georges Bochaton. Il faut voir iOn comme un investissement sur le long terme, un produit qui, c’est notre volonté, pourrait faire de nous le manufacturier des véhicules électriques."
Cette gamme va d’ailleurs progressivement être étendue à l’ensemble du portefeuille du groupe. Cohabitant encore cette année avec Ventus S1 Evo EV (qui se concentre quant à lui sur les véhicules du segment B/small et A/mini), elle couvrira tout le spectre électrifié à partir de 2026.
Cet article est extrait du Journal du Pneumatique n°179 de mars-avril 2023.