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Marché

Manufacturiers et athlètes, une relation de partage

Publié le 25 août 2023

Par Louis Choiset
7 min de lecture
Omniprésents dans le milieu du sport depuis des années, les manufacturiers balayent de nombreuses disciplines, compétitions et clubs par leurs partenariats. Animés par le partage de valeurs communes et la performance, les spécialistes du pneumatique sont également en quête d’humanisation de leurs marques. C’est donc au tour des athlètes d’entrer en piste.
En vue des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, Bridgestone a lancé la campagne «Prêt à performer» et accompagne cinq sportifs : Amandine Buchard (judo), Mandy François-Elie (100 m, 200 m et 400 m paralympiques), Kevin Mayer (décathlon), Pauline Ado (surf) et Manon Apithy-Brunet (escrime).

Gwangju (Corée du Sud), 5 mai 2019. Deux ans après avoir raflé une médaille d’or à Budapest pour le 5 km du Championnat du monde de natation en eau libre, à quelques mètres de l’arrivée, Marc-Antoine Olivier s’apprête à revivre l’exploit. Malheureusement pour le nageur français, à une seconde près, le rêve d’une seconde médaille d’or s’évanouit dans les eaux du Yeosu Expo Ocean Park. L’Allemand Florian Wellbrock lui vole la vedette en échange d’une médaille d’argent.

La performance reste de taille. Sous le regard admiratif des spectateurs, cette réussite est aussi le fruit de l’accompagnement de son partenaire, Wyz Group, spécialisé dans la création de solutions digitales pour le commerce de pneumatiques. "Ces aventures, d’abord humaines, ce sont des moments de bonheur à vivre que l’on retrouve avec ce genre de collaborations", lance Pierre Guirard, président du groupe. En témoignage de cette proximité née du partenariat, Marc-Antoine Olivier est venu présenter sa médaille aux salariés.

Aurélie Muller, nageuse française et seconde athlète accompagnée par Wyz, est également une fierté pour la firme basée à Compiègne (60). Entre 2011 et 2017, elle a garni son palmarès de quatre médailles d’or et deux d’argent. Dans cette collaboration, le succès vaut de l’or, et ce n’est pas qu’une expression. "Nous avons ajouté des primes à la performance", glisse Pierre Guirard.

Une manière de récompenser le travail bien fait, à l’image d’un salarié dans une entreprise. En effet, selon Pierre Guirard, de nombreux parallèles sont à faire entre les athlètes et la réussite d’une entreprise. C’est pourquoi Wyz Group aide financièrement ses athlètes pour leur permettre de se concentrer au mieux sur leur carrière sportive.

Pour cela, il s’appuie sur le Pacte de performance, dispositif qui a vu le jour grâce à la Fondation du sport français (FSF). L’objectif est de promouvoir et de financer, sur le territoire national, la formation, l’insertion socioprofessionnelle et la reconversion des sportifs de haut niveau. Elle vise également à encourager les entreprises à mettre la main à la poche, un chemin qu’a choisi d’emprunter Wyz.

Un soutien financier loin d’être anodin

En pratique, l’entreprise propose un accompagnement financier à hauteur de 20 000 euros net annuels par athlète. Une manière de les soutenir et de financer leurs différents projets. Pour le second point, les athlètes ont accès à l’insertion professionnelle en passant par des programmes de formation spécialisés, un parcours de découverte des métiers, du networking et des conseils.

Les manufacturiers et leurs athlètes ont les JO 2024 dans le viseur.

Pour Wyz, l’histoire avec Marc-Antoine Olivier et Aurélie Muller a vu sa dernière page se tourner lors des JO 2020 de Tokyo (Japon). Pendant que le premier terminait la course à la sixième place, la seconde commentait sa prestation au micro de France Télévisions. La fin d’un cycle, tel était le sentiment pour les deux parties. "Parfois, mieux vaut mettre un terme à la collaboration lorsque nous avons le sentiment que le plus beau est derrière nous. Nous avions fait ensemble ce que nous avions à faire, c’était une belle expérience qui s’est terminée en 2021", résume le président de Wyz.

Si cette histoire a pris fin, d’autres ne font que commencer. En 2022, Bridgestone lançait sa campagne "Prêt à performer". Le partenaire des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 s’est appuyé sur cinq ambassadeurs de la marque : Kevin Mayer (décathlon), Mandy François-Elie (100 m, 200 m et 400 m paralympiques), Amandine Buchard (judo), Manon Apithy-Brunet (escrime) et Pauline Ado (surf). À travers cet engagement, l’entreprise affiche l’ambition d’un visage plus humain.

C’est ce qu’expliquait Magali Tezenas du Montcel, déléguée générale du cabinet d’études Sporsora, dans nos colonnes en novembre-décembre 2022 (Journal du Pneumatique n° 176-177) : "Par du storytelling, Bridgestone fait le parallèle entre la performance des athlètes et celle de leurs produits. Ces marques ont besoin d’être humanisées aux yeux du grand public. C’est pourquoi elles ont besoin de s’accrocher à l’humain, aux histoires et à l’accompagnement des performances des athlètes."

Chez Michelin, un partenariat en cache 20 !

Pour Michelin, la relation est inscrite dans le temps et dure depuis une dizaine d’années. Pas étonnant chez ce manufacturier marqué d’un lien fort avec le sport, datant de 1911 avec l’ASM Clermont Auvergne, célèbre club de rugby de la région. C’est plus récemment, en 2014, que l’entreprise a créé la Team Michelin. Celle-ci est constituée de 20 sportifs issus de disciplines très variées.

"Avec l’ASM, nous avions fait le choix d’un sport plutôt connu. Désormais, le multisport est le moyen de montrer que nous soutenons toutes les disciplines", explique Claire Bourlange, directrice communication du groupe. Le but de Michelin est de mettre en lumière des sports méconnus et de susciter des vocations. Tout cela en s’appuyant sur des partenariats aux disciplines diverses, certes, mais pas seulement car dans ces collaborations, on trouve aussi trois sportifs handisports.

"L’idée était d’avoir une action sur nos employés à travers le sport, et de promouvoir sa pratique et ses valeurs auprès des salariés du groupe Michelin en France, au travers de rencontres et d’événements organisés avec ces athlètes", ajoute Claire Bourlange.

Ces collaborations s’articulent autour de deux niveaux. Pour le premier, l’ensemble des sites en France est concerné, sachant que chacun d’entre eux est représenté par un sportif. Ce même site a pour mission d’organiser les modalités de la venue de l’athlète pour l’adapter à ses envies, ses besoins et ses spécificités. Il s’agit parfois d’une visite d’atelier, de l’organisation des séances posturales ou même de conférences sur la nutrition. Pendant les "journées des familles", les enfants peuvent se mesurer aux athlètes lors de différents défis.

Une possible voie d’insertion professionnelle

"C’est le premier niveau, le management de la relation entre le site et l’athlète. Ensuite, le deuxième concerne la gestion de la relation partenariale, ce qui se fait au niveau de la communication en France. C’est à ce moment que nous travaillons avec les sportifs sur leurs envies, leurs besoins, la façon de développer le partenariat, leurs perspectives d’avenir…", détaille Claire Bourlange.

Dans ce genre de partenariat, l’enjeu se trouve habituellement au niveau du développement de la notoriété, le renforcement de l’image de marque et l’élargissement de sa perception. Avec la Team Michelin, le groupe veut se muer en exception. "Avec les athlètes peu connus, l’enjeu n’est pas tant la notoriété que l’implication dans la vie locale, dans le sport et le soutien de personnes avec lesquelles nous partageons les mêmes valeurs", ajoute la responsable.

A lire aussi : Marketing : les manufacturiers toujours aussi mordus de sport !

Le fait que ces athlètes ne puissent pas vivre de leur seule activité sportive soulève un problème que Michelin tend à résoudre, de par son statut de partenaire. Comme dans le cas de Wyz, un accompagnement financier est renouvelé chaque année. Autre point commun avec la société compiégnoise : la prime de réussite. En effet, les athlètes de la Team Michelin bénéficient d’une "prime exceptionnelle" s’ils se qualifient pour les Jeux Olympiques dans la période du partenariat. Le dispositif est d’ailleurs toujours le même en ce qui concerne une possible réinsertion professionnelle.

"Nous avons mis en place, dans des cabinets de recrutement et de conseil, un accompagnement de fin de carrière que les sportifs peuvent activer s’ils le souhaitent", rapporte la directrice de communication du groupe. Ce partenariat a déjà porté ses fruits puisqu’en 2020 à Tokyo, Jean Quiquampoix (tireur sportif), membre de la Team Michelin, a remporté le Graal en étant sacré champion olympique.

Une collaboration sur mesure

Dans un autre style, la collaboration entre Continental et Pauline Déroulède, championne de France de tennis en fauteuil, a des allures de coup de foudre. Cette union a vu le jour en mai 2022 autour d’un objectif de sécurité. Pauline Déroulède, victime en 2018 d’un accident qui lui a coûté sa jambe gauche, milite depuis lors pour sensibiliser à la sécurité routière. Un combat partagé par Continental.

Olivier Schneider et Continental accompagnent Pauline Déroulède dans une recherche commune de performance. ©Continental

 

Ainsi, lorsqu’Aude Skorodensky, directrice marketing Continental France activité pneumatiques, parle du partenariat parfait, elle a tous les éléments pour le justifier. Nous avons choisi ce partenariat via deux critères. D'abord, nous partageons les mêmes valeurs : passion de gagner, liberté d’action, confiance et esprit d’équipe. Ensuite, c'est sur la base de nos thématiques, nos piliers de communication et les sujets sur lesquels nous voulons nous positionner, qui sont la mobilité, la sécurité, la performance et l’environnement, que nous avons noué ce partenariat, liste-t-elle.

En réponse, Pauline Déroulède remplit tous les critères. Pour la passion : elle est championne de France de tennis fauteuil 2021 et 2022. Concernant l’esprit d’équipe, elle est reconnaissante envers ceux qui l’accompagnent au quotidien. Sur la liberté d’action et la confiance, c’est son retour après son accident et son ambition de faire les Jeux Paralympiques. Quant au deuxième point abordé par Aude Skorodensky, on retrouve la sécurité, pour laquelle elle milite.

C’est notre seul partenariat athlètes car c’est une vraie relation humaine que nous avons créée et c’est quelque chose que nous ne pourrions pas faire à grande échelle pour le moment car cela demande un gros investissement de temps. Nous considérons que Pauline a déjà tout ce que nous recherchons, explique Aude Skorodensky. "Pauline parle de la sécurité du conducteur et de ses capacités et nous nous penchons sur la sécurité du véhicule. C’est à ce moment-là que nos engagements se rejoignent. Nous nous enrichissons les uns les autres du public que nous côtoyons traditionnellement".

Humaniser la marque

Dans les avantages perçus par le groupe, presque comme une habitude, on retrouve une nouvelle fois cette notion d’humanisation.Cette visibilité est humanisée par un visage posé sur la marque. Nous montrons aux Français que notre choix s’est porté sur une athlète française, qu’elle porte nos couleurs et que nous portons les siennes, raconte Aude Skorodensky.

Pour l’aspect financier, cette fois, le contrat de partenariat stipule un montant défini à l’avance que Pauline Déroulède gère ensuite librement, au gré de ses besoins. Toujours avec cet objectif d’assurer une stabilité financière et technique permettant à l’athlète de s’entraîner et de se concentrer sur ses objectifs. Continental n’a pas souhaité communiquer sur la somme engagée dans le partenariat mais, selon le groupe, celle-ci lui permet de rester focalisée uniquement sur son activité sportive.

Le partenariat court sur trois ans, Continental accompagne Pauline Déroulède jusqu’aux Jeux Olympiques. Événement durant lequel le manufacturier se cantonnera au rôle de supporter. Nous irons l’encourager de toutes nos forces mais ça s’arrête là. Nous n’avons pas d’action spécifiques sur l’évènement. L’équipe Continental sera présente le plus possible aux matchs pour la soutenir, annonce la directrice marketing. Rendez-vous donc aux JOP de Paris 2024, où les athlètes français, accompagnés de leurs partenaires, pourront rêver ensemble de belles histoires et de médailles.

Cet article est extrait du Journal du Pneumatique n°180 de mai-juin 2023.

 

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Le Pacte de performance, entre financement et réinsertion professionnelle

Le dispositif du Pacte de performance, de la Fondation du sport français, s’appuie sur deux mécénats, l’un financier et l’autre dit "de compétences". Pour le premier, il s’agit de bourses dont le plancher est fixé à 20 700 euros par athlète et par an. Ce montant représente en moyenne la somme nécessaire pour l’accompagnement d’un sportif. Le mécénat financier permet aussi une défiscalisation.

"60 % du don versé sur l’impôt des sociétés (IS) dans la limite de 0,5 % du CA de l’entreprise ; 66 % du don versé sur l’impôt sur le revenu (IR) dans la limite de 20 % des revenus imposables ; 75 % du don versé sur l’impôt sur la fortune immobilière (IFI)", selon la Fondation du sport français. Le coût annuel d’un partenariat pour l’entreprise est de 23 000 euros, dont on enlève 60 % de déductions fiscales, ce qui donne une somme de 9 200 euros.

Pour le mécénat de compétences, l’entreprise va choisir un sportif qui correspond à ses attentes, notamment au niveau des qualifications mises en avant par son CV. L’athlète partagera son temps entre travail en entreprise et période dédiée à son projet sportif.

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