Jean-Baptiste Pieret, Black Star : "Grâce à Bridgestone et Béthune, on a fait un bond de géant"
Spécialiste des enveloppes rechapées, Black Star s'est associé à l'été 2021 au groupe Mobivia pour donner naissance à une unité de production de pneumatiques reconditionnés TC4 (tourisme, 4x4/SUV, camionnettes) de grande envergure sur l'ancien site Bridgestone de Béthune (62). Quelques semaines plus tôt, le 30 avril, celui-ci avait fermé ses portes après 60 ans de bons et loyaux services. L'investissement total d'une dizaine de millions d'euros de Black Star et Mobivia a été soutenu par une aide de l’État et des collectivités de l'ordre de 2,3 millions ce qui a permis, dès début 2022, de mettre en route ce nouvel outil de production.
Président de l'entreprise basée à Saint-Pierre-de-Bœuf (42), là où se trouve son usine historique qui se concentre désormais sur les produits de niche (4x4 off road, VUL cramponnés, dimensions courtes…), Jean-Baptiste Pieret était l'invité d'une table-ronde sur les défis de la réindustrialisation organisée le 16 juin dernier pour les 80 ans du LRCCP (laboratoire de recherches et de contrôle du caoutchouc et des plastiques) et de l'Ifoca (institut de formation du caoutchouc). Entouré d'autres entrepreneurs, le dirigeant est revenu sur cette aventure qu'il apparente, avant tout, à la rencontre de deux familles.
Une vraie bond dans la production
"Quand Bridgestone a annoncé la fin de Béthune, je me suis vraiment interrogé. Et puis très vite, je me suis dit que c’était notre chance, que c'était une vraie opportunité de faire grandir Black Star. Ensuite, il y a eu la rencontre avec Mobivia et la famille Derville. On voulait revitaliser ce site et le faire ensemble car on est très complémentaire avec d'un côté le savoir-faire technique et d'un autre le savoir-faire commercial."
Dès le départ, le duo entend s'appuyer sur le manufacturier nippon pour concrétiser ses ambitions car, en dépit de sa défection, Bridgestone avait beaucoup à apporter dans ce projet. "On a besoin de manufacturier premium pour faire du reconditionnement premium, souligne Jean-Baptiste Pieret. Grâce à Bridgestone et Béthune, on a fait un bond de géant dans notre industrie. On a hérité d'outils haut de gamme, ce qui a une conséquence directe sur le produit fini. Nous qui faisons un métier encore très artisanale sommes désormais en capacité de robotiser et automatiser la production. C'est quelque chose de totalement novateur".
Le potentiel est là
Aux côtés des machines, il y a aussi des hommes et des femmes. Black Star et Mobivia ont, là-encore, souhaité capitaliser sur l'expérience et le savoir-faire des équipes nordistes. "On a aucun problème à admettre qu'on a d'abord sollicité les ex-Bridgestone pour nous rejoindre. C'est eux qui doivent porter le projet", ajoute-t-il alors qu'environ 150 à 180 salariés animeront le site à horizon 2025.
Tout ceci doit contribuer à faire émerger une filière mêlant excellence et volumes au sein de laquelle Black Star et Mobivia entendent prendre le leadership. "Lorsque l'on sait que 250 millions de pneumatiques sont démontés chaque année en Europe, on se rend compte du potentiel de ce marché, commente le dirigeant. D'autant qu'on est là dans une vraie tendance sociétale avec une demande des consommateurs qui est aujourd'hui militante, attachée à une forte notion de responsabilité".
Plus qu'une usine, un écoparc
L'usine n'a d'ailleurs pas uniquement vocation à produire puisqu'elle a été imaginée tel un écoparc. La première étape consiste bel et bien à reconditionner un million d'enveloppes par an. Celles-ci sont triés par une ligne automatisée, avec lecteurs optiques associés à l'intelligence artificielle, surveillant 30 points de contrôles de la norme Afnor… Mais cela ne représentera qu'une partie des quatre millions de pneus collectés au sein des enseignes de Mobivia (Norauto, Midas et Carter-Cash).
"Tous ceux qu'on ne pourra pas reconditionner auront une utilité. A terme, on veut faire émerger d'autres filières de valorisation en transformant, par exemple, ces pneus en granulat." Une ambition parmi tant d'autres alors que Jean-Baptiste Pieret espère réussir dans le futur à dupliquer ce modèle ailleurs en France.